Dans cette structure importante qui compte 11 Ateliers et Chantiers d’Insertion, Philippe Meynie, accompagnateur pédagogique, nous apprend que l’entrée dans la démarche en juillet 2013, est partie d’un volontariat fort des dirigeants qui, au-delà de l’intention, ont engagé les ressources nécessaires au déploiement d’une organisation adéquate
Philippe Meynie, pouvez-vous nous en dire un peu plus sur vos missions à Inserfac ?
Le poste que j’occupe, a été créé au moment de l’entrée dans la démarche CQP en juillet 2013, avec une mission prédominante sur l’accompagnement à la mise en place du CQP. Cela a consisté, dans un premier temps, à évaluer les pratiques des personnels sur chaque chantier, et désormais d’y revenir régulièrement, les appuyer et solutionner leurs difficultés (rencontre des équipes tous les 2 mois en moyenne), participer au temps d’information collective des salariés polyvalents sur la démarche.
Outre cette création de poste, quels ont été les autres moyens engagés pour l’intégration de la démarche ?
80% des encadrants techniques pédagogiques et sociaux (ETPS) et accompagnateurs socioprofessionnels (ASP) ont suivi la formation de 12 jours « Réussir un chantier école ». Le temps de travail des ETPS a été augmenté de 4 heures, à consacrer au travail préparatoire nécessaire à leur fonction d’accompagnement pédagogique (préparation et étude des supports) puis a récemment de nouveau été augmenté de 2 heures, sur la base des enseignements des premiers
mois d’application de la démarche. La totalité des sites des chantiers dispose d’une salle de travail dédiée, dont l’installation a été revue pour que chacune soit dotée de 4 postes informatiques.
Le temps d’accompagnement socioprofessionnel et pédagogique formel, auparavant fixé à une demi-journée par chantier, est passé à une journée par semaine. Parallèlement, la direction a tenu à sensibiliser les donneurs d’ordre sur cette nécessaire évolution tout en rappelant le projet d’insertion de la structure, afin qu’ils concèdent à revoir leurs exigences de production.
Concrètement, les ETPS et les ASP s’emploient au quotidien dans la démarche, en ce sens un guide pratique a été créé de façon à leur présenter le process d’actions à suivre, en direction des salariés polyvalents, tout au long de leur parcours dans la structure. Sur cette base, chaque binôme a défini des modalités et une répartition des tâches plus affinée, et appropriée à sa convenance et aux spécificités d’intervention de son chantier.
Les ETPS se réunissent toutes les 2 semaines en se rendant sur un des chantiers pour échanger sur les difficultés rencontrées dans leurs fonctions, notamment en ce qui concerne le CQP, confronter leurs points de vue et pratiques, identifier des solutions, y compris des thèmes de formation.
Ces aménagements ne nous ont pas épargné un changement des pratiques d’accompagnement difficile pour l’encadrement. Celui-ci, dans l’ensemble, a jugé lourd le travail de formalisation demandé pour la création des supports d’apprentissage mais aussi particulièrement pour l’évaluation où il a fallu fournir un effort d’appropriation du livret de suivi qui impose de nombreuses capacités et compétences à évaluer. L’ETPS est dorénavant très sollicité et amené à se corriger pour se plier à l’exigence d’objectivité que cet exercice demande.
Comment est organisée l’alternance pédagogique ?
La journée d’accompagnement du salarié se divise en deux temps égaux d’accompagnement individuel et d’accompagnement en groupe. Ces temps sont conduits sous forme d’ateliers traditionnels ou propres au CQP (avec une attention renforcée sur le livret de suivi). Ces temps d’apprentissage peuvent être formels ou informels, inscrits ou non sur cette journée.
La difficulté notable qui demeure aujourd’hui est la mise en place des périodes de mise en situation en milieu professionnel (PMSMP) de 70 h requises, faute de propositions suffisantes dans les entreprises.
Comment vous êtes-vous adaptés à l’exigence d’évaluation ?
Tous les trimestres, un point est fait entre un ETPS et le salarié afin d’échanger, de provoquer un retour sur l’évaluation et fixer des objectifs.
Comment sont mis en place les jurys ?
Le fait que nous ayons une certificatrice du réseau présente sur la région est propice à la communication et la disponibilité. Nous avons progressivement intégré les contraintes de gestion des plannings des participants et organisons désormais les jurys deux mois à l’avance, ce qui permet aussi d’avoir assez de temps pour constituer les dossiers
preuves.
Il est également difficile de trouver des chefs d’entreprises pour présider les jurys, or nous y tenons puisque leur concours, s’est à chaque fois avéré très intéressant et bénéfique pour l’évaluation du salarié. C’est un moyen de présenter le travail de la structure de façon explicite et une opportunité de créer des liens pour les suites de parcours.
A cette étape, le constat de bilan que nous faisons est que, si les premiers temps ont révélé la difficulté d’emporter l’adhésion des salariés, mais également de l’équipe encadrante qui voyait ses pratiques modifiées, la démarche a progressivement remporté des volontaires avec, en deux ans, une forte augmentation du nombre de salariés présentés en jury. Il n’y a pas meilleur témoin de l’impact de la démarche que les retours qu’ils nous font eux-mêmes, de l’intérêt
qu’ils en tirent, la valorisation et l’enthousiasme qu’ils éprouvent, à démontrer leurs acquis développés sur le chantier et à l’idée d’être évalués.